Pôle École Inclusive de Seine-et-Marne

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M GAUTHIER Julien

Court-métrage : Les vraies SEGPA !

16 / 06 / 2022 | M GAUTHIER Julien

Court-métrage : Les Vraies SEGPA

Tous les ans depuis une quinzaine d’année, M. Bonnans (professeur de segpa et professeur relais pour le dispositif de collège au cinéma) réalise des courts métrages avec ses élèves de 4ème Segpa. Le but est d’ouvrir les élèves à la culture cinématographique afin de leur donner des outils pour appréhender la puissance de l’image et prendre du recul par rapport à celle-ci. 


En lien avec le dispositif "Collège au cinéma", le but de ces séances d’apprentissage est de partir des émotions que les élèves ressentent tous à la vision des films pour ensuite les informer sur les techniques de cinéma et la mise en scène. Quinze ans de courts métrages et quinze histoires différentes tous les ans : du comique, du policier, du parodique et même de la science-fiction.


 Mais en cette année scolaire 2021/2022, il y eut un bouleversement : un film sort le 20 avril 2022, un film qui porte le nom de notre section : LES SEGPA. Un film tiré d’une web-série qui avait son petit succès et qui déjà avait fait des dégâts sur l’image de notre section ; mais cette fois-ci, c’est sur grand écran, ce sont des publicités dans les rues sur de grandes affiches et c’est aussi une bande annonce.


Les élèves de Segpa sont des élèves ayant des difficultés durables et persistantes que l’équipe enseignante de la SEGPA vise à remettre sur le chemin de la réussite en les orientant vers une voie professionnelle. Nul besoin de rajouter à leur souffrance. La web série et ce film participent à la stigmatisation de nos élèves qui n’ont pas besoin de cela. Bien sûr, les films sur les mauvais élèves ou les cancres sont légions : Les sous-doués de Claude Zidi ou Les Profs de Pierre François Martin Laval, mais ces films n’utilisent pas un nom qui désignent une catégorie d’élèves. En utilisant le nom SEGPA, les dégâts sont violents.


Devant cette bande annonce, les élèves ont décidé de répondre et quoi de mieux comme réponse que de faire eux aussi un film, avec leur moyen et l’aide de M. Bonnans et de l’équipe de la SEGPA. Un film amateur que beaucoup d’élèves traditionnels seraient incapables de faire mais, eux, les soi-disant cancres joués par des adultes dans le film de Ali Boughéraba et Hakim Boughéraba ont décidé de tourner une réponse avec leur quotidien, leur vérité.


Pour cela, il a fallu écrire une histoire. Les élèves ont été répartis par groupe et ont chacun répertorié la particularité des Segpa par rapport à un enseignement traditionnel : les ateliers, les stages au cour de l’année dès la 4ème, pas plus de 16 élèves par classe. Très rapidement ils se sont rendus compte que le film allait être ennuyeux, si on se contentait d’énumérer les qualités de la Segpa. M. Bonnans leur a donc demandé de trouver une astuce, ou une histoire pour dynamiser le film. Chaque groupe a eu son idée, celle du cinéma burlesque d’un des groupes fut choisi lors de la mise en commun.


Nous avons donc ensuite mis en commun en groupe classe les différentes histoires pour synthétiser le tout et arriver à une seule histoire.


Le travail mené en classe sur Charlie Chaplin les ayant inspirés, les élèves ont eu l’idée de faire une première partie burlesque en caricaturant la Segpa de manière plus fine que le film de cinéma, c’est à dire en rendant hommage à plusieurs personnages mythique du 7ème art comme Dark Vador, Norman Bates, Harry Potter et bien évidemment Charlot. Les élèves décidèrent que cette partie serait en noir et blanc et la deuxième en couleur pour bien marquer la rupture de ton. Pour renforcer encore cela, toujours en s’appuyant sur les cours de cinéma, les élèves décidèrent de briser le quatrième mur, c’est à dire de regarder la caméra pour s’adresser aux spectateurs et leur donner leur version de ce qu’est leur formation.


Une fois l’histoire écrite, les élèves la transforme en scénario avec toutes les transformations que cela implique : raconter une histoire uniquement visuelle et non introspective ou omnisciente.


Puis ce scénario doit être repris phrase par phrase sous la forme d’un découpage technique qui décrira plan par plan notre histoire : chaque plan doit être situé, et décrit d’un point de vue technique (mouvement de caméra, son, musique, mouvement des personnages etc.). En s’inspirant des séances de travail sur le cinéma, les élèves ont décidé de décrire la SEGPA en plusieurs plans séquences et en travelling arrière afin de dynamiser la deuxième partie qui pouvait paraître théorique et moins attrayante : contrainte technique pas évidente mais qu’ils ont relevé avec brio.
L’étape suivante est le casting : les différents postes pour le tournage sont listés, les élèves font part de leurs vœux et on fait un casting de compétence pour le jeu d’acteur mais aussi pour la technique. Chaque élève a donc une chose bien précise à faire lors de la journée de tournage et une responsabilité qui lui est propre.
Le tournage s’est déroulé en une journée, les élèves ont été très sérieux, particulièrement Amélie qui avait un long texte à apprendre et à réciter en faisant attention aux contraintes techniques et Alex qui a relevé les challenges technique (travelling en fauteuil roulant) avec brio.


Les élèves ont été initiés au montage par la suite ; mais le montage a été surtout réalisé par leur professeur, M. Bonnans, sous leur direction bien évidemment.


Mais ce n’est pas encore fini, le son élément majeur des films a été retravaillé avec un musicien et bruiteur professionnel, Jean Carl Feldis, qui intervient lors de trois séances de 4 heures tout le long de l’année. Les deux premières séances sont consacrées à l’initiation et la pratique, quand la troisième est consacrée à la réalisation complète de la bande sonore du film que les élèves ont eux même réalisé : ainsi le film est leur œuvre à part entière. Avec Jean Carl, les élèves ont post synchronisé certains dialogues (les bruits en atelier, même discret perturbait le discours) et si ce doublage est visible, il nous paraissait plus important que le discours soit clair mais de laisser cette petite maladresse technique, car le principal but de ce film est bien son message. Les élèves ont aussi réalisé la musique sous la direction de Jean Carl Feldis.


Le bilan de ce projet est donc plus que positif, car si les élèves ont répondu à ce film qu’ils vivent comme une injustice, ils ont prouvé par la réalisation même de ce message qu’ils sont capables de réaliser un bel objet personnel, un bel objet qui donne un message et qui leur appartient totalement puisqu’ils l’ont bâti de A à Z. Ils ont prouvé par là même que les élèves de Segpa ne sont pas des adultes attardés incapables de construire quoique ce soit mais bien des collégiens, certes en difficulté scolaire, mais qui savent se prendre en main et profiter de l’outil Segpa qui leur permet de se remettre sur les rails et d’avoir un avenir professionnel.

 
Dernière mise à jour :
04 / 12 / 2023